Vous êtes ici

Port-au-Prince, 20 juillet 2020 -- Ils sont plus d’une centaine de migrants haïtiens des deux sexes à rentrer de la République Dominicaine par la frontière de Ouanaminthe, Nord-Est d’Haïti, ce 6 juillet 2020. Ces retours volontaires ont augmenté depuis l’entrée de la Covid-19 sur le territoire dominicain, avec comme effet collatéral la perte par ces migrants de leurs emplois précaires. Sur le chemin du retour, ils sont parfois victimes de violences et d’extorsions.

Impactées par la Covid-19

« Pendant les 3 ans que j’ai passé en République Dominicaine, je gagnais un peu d’argent sans avoir pu épargner vraiment, le coût du loyer pour une petite chambre en République Dominicaine étant estimé à 100 dollars américains », indique Christèle.

Ayant perdu son emploi de ménagère dans un appartement - où elle travaillait depuis environ 3 ans - consécutivement à l’entrée sur le territoire dominicain de la Covid-19, Christelle a décidé de regagner son pays natal. A 36 ans, elle est mère de 6 enfants dont le père de 5 d’entre eux est décédé il y a bientôt 4 ans.

C’est aussi pour cause de difficultés économiques amplifiées par la pandémie qu’Erlande, 24 ans et enceinte de 8 mois, a décidé de retourner en Haïti. « L’argent passe dans les soins de santé et d’autres dépenses courantes, et la Covid-19 est venue compliquer la situation », affirme-t-elle. Christèle vivait depuis 3 ans avec son mari en République Dominicaine et y gagnait sa vie en vendant des sous-vêtements sur le marché informel.

Le dispositif de surveillance à l’arrivée des migrants

 « Il y a beaucoup de gens qui rentrent par la frontière pendant la pandémie, nous ne pouvons pas les laisser entrer comme ça, nous sommes obligés de faire une surveillance, c’est-à-dire identifier les cas suspects liés à la Covid-19 », explique le coordonnateur du poste de contrôle frontalier et centre de quarantaine frontalier de Ouanaminthe, Dr Kensly Flécher.  

Au poste-frontière de Ouanaminthe, nous avons observé ce 6 juillet des volontaires de la Croix Rouge Haïtienne qui font de la sensibilisation pour les arrivants à travers un mégaphone, un dispositif d’identification, de collecte de données et de distribution de kits de voyage aux personnes vulnérables, dont les femmes enceintes, les personnes avec un enfant, celles vivant avec un handicap et les vieillards.

« Comme vous le voyez, nous prenons leur température, si après deux prises espacées, la température reste élevée, nous avons une ambulance qui les transporte vers le centre de quarantaine », souligne le Coordonnateur du Sous-Bureau de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) à Ouanaminthe, Michelot Difficile.

Quid de la quarantaine ?

« Pendant la quarantaine, tous les jours, nous faisons le contrôle des signes vitaux pour ces gens, nous les évaluons, une équipe de psychologues leur fournit un appui psychologique, nous suivons leur évolution pour voir s’il n’y a pas parmi eux qui présentent les signes et symptômes du Coronavirus », précise Dr Flécher.

« Une fois les résultats des tests de dépistage connus, les personnes testées positives sont acheminées vers un centre d’isolement tandis que pour celles testées négatives sont envoyées chez elles, après des séances de counselling, de sensibilisation, et d’éducation », ajoute le coordonnateur du poste de contrôle frontalier et centre de quarantaine frontalier.

Traitement spécial aux femmes enceintes

En raison de leur vulnérabilité à la Covid-19 et du fait qu’elles n’avaient pas eu la chance de faire une visite dans un hôpital ou un centre de santé en cette période de confinement en République Dominicaine, les femmes enceintes qui arrivent à la frontière reçoivent un traitement spécial.

« Une fois que ces gens arrivent à la frontière, nous leur parlons, nous vérifions s’il y a parmi elles qui ont besoin d’aller à l’hôpital, nous les envoyons à l’hôpital », souligne Dr Flécher. « Pour celles qui présentent les critères pour aller en quarantaine, nous poursuivons avec les autres suivis pour ces personnes », conclut-il.

Outre Ouanaminthe, ce dispositif de surveillance épidémiologique pour éviter la propagation dans le pays de la Covid-19 est en place également dans les trois autres points frontaliers officiels, à savoir Belladère, dans le Centre, Malpasse, dans l’Ouest, et Anse-à-Pitres, dans le Sud-Est.

Sauver des vies

L’UNFPA a mis en œuvre ce projet afin de permettre une réponse coordonnée pour sauver des vies face à l'épidémie de COVID-19, en particulier à la frontière haïtiano-dominicaine, grâce à un soutien intégré en matière de santé, de protection et de soutien socio-économique. Cette réponse coordonnée implique la participation, sous la coordination du Ministère de la Santé Publique et de la Population (MSPP), plusieurs acteurs, dans le cadre de leurs projets respectifs, comme l’OIM, l’OMS, CDS, GHESKIO et Zanmi Lasante.

Depuis le début de cette pandémie en Haïti, l’UNFPA est très engagé dans la réponse nationale à la Covid-19 aux côtés du Gouvernement haïtien, tout en assurant la continuité des services de santé reproductive, santé maternelle et services pour les survivantes de violences basées sur le genre (VBG). Parmi les piliers identifiés par le comité multisectoriel de gestion de la crise qui a été mis sur pied, l’UNFPA joue un rôle prépondérant dans les piliers communication et engagement communautaire, surveillance épidémiologique et gestion de cas.

Texte : Vario Sérant

Photo : Samuel Laméry